1           Electrocardiographe

1.1          Objectifs et principes

L’électrocardiographe décrit ci-après rend audibles et visibles les battements cardiaques. Il exploite l’amplificateur d’instrumentation AD620 d’Analog Devices. Le rôle d’un amplificateur d’instrumentation (ou de mesure) est expliqué au §1.1.2 ci-après.

1.1.1          L’ECG

La Figure 1 donne une idée de la difficulté à extraire le signal électrique cardiaque. En outre, aux faibles niveaux de tension il faut ajouter les effets toutes les sources de perturbations électromagnétique que le corps peut capter (essentiellement de le rayonnement 50Hz du secteur).

 

Figure 1: Caractéristique du signal ECG (extrait de [1])

1.1.2          L’amplificateur d’instrumentation

L’amplificateur d’instrumentation[1] (AI) a pour objectif de mesurer la différence entre deux tensions. Par rapport à un simple montage soustracteur à amplificateur opérationnel, l’AI présente plusieurs avantages :

·         L’impédance d’entrée est très grande (le premier étage de l’AI est constitué de deux amplificateurs)

·         Le rejet du mode commun est très élevé.

Considérons tout d’abord le montage soustracteur classique :

Figure 2: Soustracteur à amplificateur opérationnel

On a :

 

avec

et

Or l’expression de peut s’écrire en fonction du gain différentiel  (gain par rapport à ) et au taux de rejet du mode commun ) :

par identification, on obtient :

et

Le rejet du mode commun est maximal lorsque, soit :

On peut par exemple prendre :  et  mais il faudra apparier précisément les résistances et ce sur tout la gamme de température.

Le montage soustracteur n’est pas idéal car son impédance d’entrée n’est pas très élevée.

Pour supprimer ce problème, on peut placer un ampli suiveur sur chacune des entrées, ce qui conduit au montage suivant :

Figure 3: Soustracteur « amélioré »

Mais on peut faire encore mieux avec le montage suivant :

Figure 4: Amplificateur d’instrumentation

Posons .

En considérant les amplificateurs opérationnels parfaits, on a puisque les tensions entre les deux entrés de chaque ampli-op sont nulles.

On a aussi :

D’où

Le mode commun en entrée s’écrit :

Le mode commun en sortie s’écrit :

Or et d’où :

Les tensions de mode commun en entrée et en sortie sont les mêmes !

Mais la sortie est amplifiée :  qui peut prendre une valeur très élevée. Cela rebient à dire que le mode commun est réduit du même rapport. Le montage amplificateur d’instrumentation réduit donc très fortement le mode commun.

On peut réaliser son « propre » AI à partir de composants discrêts et d’amplificateurs opérationnel, mais l’obtention d’un taux de rejet de mode commun élevé requiert des résistances parfaitement appariées… C’est pourquoi on utilisera plutôt des AI intégrés comme l’AD620 (ou son équivalent LT1620 chez Linear Technology).

Concernant les amplificateurs d’instrumentation, on pourra se référer à l’article de Nash [2] ou aux nombreux cours disponibles sur internet dont celui de l’Université Joseph Fourier [3].

1.2          Réalisations

1.2.1          Montage no1 : signalisation sonore des battements

Le premier montage est uniquement analogique. Il a pour objectif de détecter les battements et de les signaler par un « bip ». L’élément clef est l’amplificateur de mesure (instrumentation amplifier en anglais) AD620 d’Analog Devices ; d’ailleurs, le montage reprend le schéma proposé dans la datasheet de ce composant [4]. Ce schéma est reproduit sur la figure ci-après.

Figure 5: Utilisation d'un AD620 dans un ECG (extrait de [4])

Le montage comporte 3 éléments :

·         Un amplificateur d’instrumentation qui mesure le signal électrique cardiaque ;

·         Un ampli-op qui génère la référence de tension des électrodes de mesure ;

·         Un ampli-op intégrateur chargé de maintenir la tension de sortie autour de zéro (sans cet élément, le niveau mesure « flotte » sur un signal variable)

·         Un ampli-op amplificateur inverseur chargé d’amplifier le signal issu de l’amplificateur d’instrumentation ;

·         Un filtre « notch » chargé d’éliminer le signal à 50Hz qui parasite le signal utile (filtre actif à ampli-op) ;

·         Un comparateur chargé de détecter les pics correspondant aux battements ;

·         Un monostable chargé de maintenir le signal de détection pendant une durée suffisante pour que le « bip » soit audible ;

·         Un NE555 chargé de générer le « bip ».

 

Ces différents éléments sont décrits en détail dans les sections qui suivent. Le schéma complet est donné au paragraphe (c).

(a)                      Mesure et filtrage

Les sondes de mesure sont constituées de papier aluminium ménager collé sur du ruban adhésif plastifié épais. On peut cependant trouver divers type d’électrodes sur eBay (voir Figure 7).

Figure 6 : Une électrode de mesure « faite maison »

Figure 7 : Quelques exemples d’électrodes ECG disponibles sur eBay

 

La référence de tension des électrodes est générée par le premier ampli-op (un ADJ705 sur le schéma originel d’Analog Devices, un TL074 dans notre montage).

Sur le montage d’AD, l’entrée VREF de l’AD620 est mise à la masse ; si on fait cela, on observe de larges ondulations du signal mesuré par l’ampli-op. Pour supprimer cette ondulation, on intègre le signal de sortie de l’AD620 et c’est alors cette tension qui sert de référence. L’effet de ce dispositif est bien visible sur la Figure 8 qui montre les courbes avant et après régulation[2]. On notera que le signal est très bruité.

Figure 8 : Suppression des ondulations de très basse fréquence

A titre de comparaison, le signal (une fois inversé !) devrait avoir la forme donnée Figure 9 ; on voit qu’on en est loin…

http://www.intechopen.com/source/html/16116/media/image2.jpeg

Figure 9 : Forme simplifiée d’un signal ECG

Le signal en sortie de l’amplificateur de mesure est tout d’abord filtré par un filtre passe-haut constitué de la capacité C1 et de la résistance R1. L’éventuelle composante à 50Hz est éliminée par un filtre du deuxième ordre de topologie Sallen-Key. La valeur des composants a été calculée à l’aide de l’outil Filter Pro de Texas Instruments.

La Figure 10 et la Figure 11 donnent respectivement le schéma du filtre et sa courbe de réponse.

Figure 10 : Schéma du filtre 50Hz

 

Figure 11 : Courbes de réponse du fitre 50Hz

La Figure 13 montre le résultat de la simulation du filtre avec LTSpice.

Le premier modèle utilise la capacité offerte par LTSpice IV pour réaliser des simulations paramétriques : la fréquence du signal d’entrée du filtre est donnée par le paramètre « FREQ » (entre accolades). Les valeurs effectives du paramètre « FREQ » sont définies par la clause « STEP ».

 

Figure 12 : Modèle LTSpice du filtre 50Hz

Le résultat est montré sur la Figure 13 : on constate bien l’atténuation du signal à 50Hz.

Figure 13 : Effets du filtre 50Hz

 

 

Modèle LTSpice du filtre 50Hz

Modèle FilterPro des filtres 50Hz et 100Hz

(le montage utilise un filtre 100Hz)

 

(b)                      Détection de pic et génération du signal sonore

Une fois le signal filtré, il est amplifié avant d’être comparé au seuil de déclenchement au moyen d’un ampli-op (il n’est pas utile d’utiliser un comparateur à hysterésis car la sortie est maintenue par un monostable). La détection du pic est réalisée par un simple comparateur à ampli-op[3]. La sortie du comparateur arrive en entrée d’un monostable qui génère une impulsion d’une centaine millisecondes ; cette impulsion active un multivibrateur à NE555 qui génère le bip.

 

Figure 14 : Schéma du monostable à transistors

 

Modèle LTSPice du monostable

 

(c)                       Schéma complet

Le schéma complet du montage est donné ci-après (il comprend aussi l’adaptation de niveau pour l’Atmega, cf. montage no2).

Figure 15 : Schéma complet de l’ECG

Modèle LTSPice du montage complet[4]

 

 

1.2.2          Montage no2

Ce deuxième montage a pour objectif de visualiser l’électrocardiogramme sur un petit écran LCD.

L’écran utilisé est du type Nokia 5110 ; on le trouve pour quelques dollars sur eBay. Il s’agit d’un écran LCD graphique N&B de 84x48 pixels piloté par une interface du type SPI. Le controleur de cet écran est un PCD8544 produit par Philips.

Le microcontroleur utilisé pour exécuter l’application est un Atmega8.

Le code C est donné ci-après. Attention : il s’agit d’un brouillon ; le driver de l’écran est une version (légèrement) modifiée d’un code récupéré sur Internet.

 

Projet Atmel Studio 6.1

 

Le niveau de tension du signal ECG produit par le premier montage est adapté pour pouvoir être échantillonné par l’Atmega.

Pour ce faire, ajoute une tension positive via un ampli-op sommateur non-inverseur  (l’un des deux contenus dans un boitier TL072, l’autre étant utilisé par le comparateur analogique qui produit le « bip »). Le signal de sortie est maintenu dans le domaine supporté par l’entrée de l’Atmega au moyen de deux diodes de clamping..

1.3          Sur le même sujet…

1.3.1          Cardiographe électrique (ECG)

La plupart des montages décrits sur Internet utilisent le schéma de base d’Analog Devices. On peut par exemple mentionner celui de  F. Sincère [6] qui adjoint à ce schéma un comparateur et un microcontrolleur PIC pour l’affichage du rythme cardiaque. Je présume que le microcontrolleur parfait le traitement du signal pour éviter les phénomènes que j’ai rencontrés.

1.3.2          Cardiographe optique

Une solution très facile à mettre en oeuvre consiste à observer non pas l’activité électrique du coeur mais ses conséquences sur le flux sanguin. Lors d’un battement cardiaque, le flux sanguin est modifié au niveau des extrémités (un doigt, par exemple) et ce phénomène peut être observe par un couple LED / phototransistor.

On trouve des capteurs complets sur eBay pour quelques dollars :

http://box349.listingfactoryhost.net/users/1205c6bdf4de44e004/eBayAuctions/ek1266/images/df114a7aea794d29a258c0c37_thumb.jpg

Figure 16: Capteur optique

 

1.3.3          Cadiographe acoustique (stéthoscope)

Parmi les montages que l’on trouve sur Internet :

·         Un montage à un seul transistor qui utilise un capteur piezoélectrique[5]

electronic stethoscope circuit schematic

Figure 17: Stéthoscope à un transistor (voir ici)

·         Un modèle à amplificateurs opérationnel (le pré-ampli est à transistors). Voir aussi le montage donné .

http://www.seekic.com/uploadfile/ic-circuit/201151021658113.gif

Figure 18 : Stéthoscope à ampli-op (voir ici)

·         Un modèle beaucoup plus sophistiqué qui traite le signal d’entrée pour le rendre plus facilement audible par un décalage fréquentiel.

Figure 19 : Schéma de principe du montage décrit ici

1.4          Références

[1]    K. Soundarapandian et M. Berarducci, « Analog Front-End Design for ECG Systems using Delta-Sigma ADCs ». .

[2]    E. Nash, « A practical review of common mode and instrumentation amplifiers ». .

[3]    O. Gallot-Lavallée, « Electronique d’instrumentation », Université Joseph Fourier, Grenoble, Notes de cours.

[4]    « AD620 low cost low power instrumentation amplifier », Analog Devices.

[5]    « Prop EKG ». [En ligne]. Disponible sur: http://www.rayslogic.com/propeller/Programming/PropEKG/PropEKG.htm. [Consulté le: 14-août-2014].

[6]    F. Sincère, « Electrocardiographe ». [En ligne]. Disponible sur: http://fabrice.sincere.pagesperso-orange.fr/cm_electronique/projet_pic/cardiogramme/cardiogramme.htm.

 

 



[1] Ou amplificateur de mesure en français.

[2] L’idée de cette régulation est empruntée à [5].

[3] Comme il y a un monostable en sortie du comparateur, il n’est pas utile d’utiliser un comparateur à hystérisis.

[4] Le modèle LTSpice utilise deux composants, « potentiometer » et « NE555 » qui n’appartiennent pas à la bibliothèque LTSpice standard. On les trouvera  à l’adresse http://ltwiki.org/?title=Components_Library_and_Circuits.

[5] Il semblerait qu’il s’agisse d’un montage d’Elektor vue l’aspect du schéma.